Chères lectrices, chers lecteurs,
La Mouche d'Argent vous invite pour un bain littéraire aux allures de bain de minuit. La Méditerranée n'est pas loin mais votre lit non plus.
Depuis quelques temps, les histoires romanesques appartiennent aux rêves. La continuité de la journée n'offre ni la folie, ni la lenteur, ni la linéarité des heures sans lumière. La journée est trop rythmée: petit déjeuner, transport, travail. Le temps passe, attentif. À la différence du soleil, les lumières artificielles, elles, ne dorment jamais. L'impossible différence entre minuit et les petites heures nous manque.
Alors cette semaine, au creux des lueurs bleutées, la Mouche d'Argent s'épanche dans les rêveries, amours et interrogations littéraires qui ne surgissent que la nuit.
Pour cette édition, on se couche tard et on se lève tôt parce que les étoiles naissent quand les jours s'éteignent.
Qu’est-ce qu’on lit aujourd’hui ?
L’Indétrônable Mouche
Les histoires rêvées de Federico Fellini
Les génies rêvent. Mais de quoi? Le livre de mes rêves couche ceux de Fellini. Ce n'est pas rien de coucher un rêve au réveil, surtout quand il préface Huit et demi. Bonne matinée en perspective!
Le moment de lecture
Journal d’un oiseau de nuit de Jay McInerney
Il faut danser, bouger, crier, attraper un taxi à la volée! Sortir nom d'un chien. Qu'est-ce que vous faites encore dans votre canapé moelleux?
La citation de la Mouche
Kierkegaard et son Journal d'un séducteur
Après les déambulations tumultueuses d’un Oiseau de la night, voici une citation du Journal d'un séducteur pour vous inviter à vous endormir, apaisé.
Le lieu de lecture
Un café avec Kundera
Le café a ses secrets. Kundera les connaît. Laissez-le vous introduire dans une fête quotidienne que l’on ne soupçonne pas: celle de l’insignifiance.
La Mouche à regarder
Marguerite Duras parle
Les amertumes de notre présent seront-elles sauvées par la mer et la lecture? Marguerite Duras livre une réponse que nous voulions vous partager.
Chères lectrices, chers lecteurs, bonne lecture!
L'indétrônable du mois : Federico Fellini
Federico Fellini, Le livre de mes rêves,
Editions Flammarion, 2020
Hors-Collection, Cinéma (nous pourrions dire "rêveries")
584 pages
Temps de Lecture : 4h-7h
Fellini est cinéaste, la Mouche dérape, tout part en vrille. La nuit arrive, on rêve les yeux ouverts devant des films en noir et blanc.
La nuit, la tranquillité et l'obscurité pèsent d'un seul poids sur le coeur. La paix nous fait peur, elle cache quelque chose sous un voile transparent. Alors, parfois, on rêve pour toucher les passions et les sentiments oubliés. Vivre endormi, hors du temps, détaché, pour inventer des dialogues de sourds-muets. Qu'est-ce que vous vous dites ? À vous-même? Quels sont vos murmures? Quels chuchotements perdurent dans les réveils en sursaut? Les bribes d'images sont les silences après les requiems. Il reste toujours quelque chose de confus et d'exaltant. Souvenirs amoureux qui ressurgissent ou douleurs enfouies. Tout est là. Au creux des nuits aux sommeils soucieux, les émotions deviennent des images. Parfois, ces dernières sont étranges. Le livre de mes rêves est celui de Fellini. C'est une cosmographie personnelle et intime. Celle de chaque matin, au réveil, pendant 40 ans.
Pas de fin. Pas de début. Seulement des soubresauts. Les rêves felliniens sont des invitations à tomber allongés. Les gens qui ronflent nous énervent alors qu'ils inventent peut-être les chefs d'oeuvres cinématographiques de demain.
Un petit extrait d'un monologue de Guido, le double de Fellini dans "Huit et demi": "Quel est ce bonheur qui me fait trembler, me redonne force et vie ? Tout me semble bon, tout a un sens, tout est vrai, j'aimerais tant pouvoir t'expliquer mais comment ? Dire la vérité, que j'ignore, que je cherche, que je n'ai pas trouvée. Ainsi je me sens en vie, je peux regarder sans honte tes yeux fidèles. La vie est une fête. Vivons la ensemble"
Pour qui : Un livre secret pour ceux qui rêvent d’être réveillé par la confusion et la beauté. Acheter Le livre de mes rêves: https://www.librairiesindependantes.com/product/9782080236678/
Journal d’un oiseau de nuit (Bright lights, big city)
Jay McInerney, Journal d'un oiseau de nuit,
Editions Point, 2017 (édition originale parue en 1984)
Roman
209 pages
Temps de lecture : 2h-4h
Les lumières étincelantes des Big Cities sont celles des nuits qui glissent. Le mouvement perpétuel ne s'arrête que pour un petit verre en guise de halte. Pour information, le narrateur prend aussi un petit rail glissé. Ah tiens, il est 2h. Une autre soirée nous appelle. Mouvement permanent et décadent parce qu’ailleurs, là où l'on n'a pas encore dansé, ça à l'air beaucoup mieux. Mais si je t'assure, les gens dansent vraiment, ici on s'ennuie comme nos glaçons. En plus, le sol colle. Taxi? Il faut partir, montez le son s'il vous plaît, ça groove dans votre voiture!
Vous ne voudriez pas faire un tour du périphérique? Parce qu'au loin, dans les nuits noires, on voit les lueurs des villes éteintes. Les solos de jazz, comme les nuits déjantées, ont existé pour les noctambules New-Yorkais des années 70. Tout ça existe encore dans un journal, celui d'un oiseau de la nuit.
Pour qui : Elles vous manquent les nuits où l’on danse, où l’on boit, où l’on chante? Nous oui, beaucoup. C’est pour ça qu’on lit Bright lights, Big City. Acheter Journal d’un oiseau de nuit: https://www.librairiesindependantes.com/product/9782757867655/
Un café avec Kundera
Milan Kundera, La fête de l'insignifiance,
Editions Gallimard, 2014
Roman
144 pages
Temps de Lecture : 1h-2h
Le café est un endroit sacré. Un lieu étrange où l'on partage avec une dizaine d'inconnus défilant, un moment d'intimité. Je bois avec vous un café brûlant, et laisse les miettes de mon croissant tomber sur la table, effrayé d'en avoir une coincée sur le bout du menton. Au café, on s’observe, on se questionne sur les activités de chacun, pourquoi étiez-vous pressés ce samedi matin ? Et pourquoi aviez-vous le regard vide devant cette grenadine ce mardi à 18h ? Le café est le lieu de fête de l'insignifiance. Le lieu de nos toutes petites activités, de nos pensées perdues qui dansent entre les tables se figeant sur les visages des autres inconnus. J'ai envie aujourd'hui que nous nous rencontrions, et pour célébrer cette rencontre puisque le thème est à la fête, je vais vous dire un secret : dans vos cafés préférés, ceux que vous visitez parfois seul et qui sont vos lieux de rendez-vous avec vous-même, vous trouverez assis avec vous un auteur tchèque à la plume fine, et l'histoire riche. Il vous offrira à vous aussi j'en suis sûr la fête de l'insignifiance, comme un rempart derrière lequel vous pourrez cacher vos regards indiscrets, en savourant la légèreté d'une situation beaucoup trop sérieuse.
Pour qui : Pour ceux qui cherchent les petits riens dans les tasses vaporeuses des lundis matin. Pour les hésitants sérieux entre l’ambition de changer le monde ou de recommander un croissant. Acheter La Fête de l’insignifiance: https://www.librairiesindependantes.com/product/9782070145645/ https://www.librairiesindependantes.com/product/9782070466146/
Citation de la semaine
Un contenu média
“Un homme, un jour, lira et puis tout recommencera.” Marguerite Duras
Le mot de la fin de la Mouche d'Argent
🖋 Rêver, danser, déprimer, boire des cafés. Oui, la nuit, on peut tout faire. Oui, on peut partir avec un(e) inconnu(e), dans une petite voiture à supplier l’éternel de nous enlacer, pour se dire encore quelques heures, quelques jours, qu’un si beau début est prometteur, plus prometteur que tous les débuts que les autres ont vécus. Les débuts ça fait se sentir exceptionnel. Mêmes ceux du passé, mêmes ceux du lycée. C'est le début de la Mouche d'Argent. Écrire pour vous, c'est exceptionnel.
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On ne vous embête pas plus longtemps, on retourne lire pour vous écrire une prochaine édition !
Bonne semaine à tous, et à dans deux semaines !
Alan & Raph.